Articles avec le tag ‘‘Ndrangheta’
Un victoire de l’état de droit sur la violence programée
En ce 20 septembre, la matinée n’est encore terminée quand deux sicaires se présentent à la hauteur d’un homme de 59 ans qui recoit 10 projectiles de 9 mm. Domenico Chirico était membre de la »ndrine (famille mafieuse calabraise) Condello (cf. L’arrestation de Pasquale Condello) et il serait le responsable du quartier Gallico (« Zoomafia » au quotidien) de Reggio.
A contrario, dans le quartier plus au sud à Archi (en photo), fin septembre, la police a arrêté un important membre de la ‘ndrine Tegano qui a décidé de collaborer avec la justice. Sa décision est d’autant plus importante qu’il est le neveu de Giovanni Tegano, un des chefs les plus influents de la ‘Ndrangheta, arrêté au printemps dernier (cf. Arrestation du « boss » Tegano et du consensus social). Il est probable que nouveau collaborateur de justice (appelé à tort « repenti ») face la lumière sur des évènements passés (cf. attentas préfecture de Palerme).
Dans le premier cas, le mafieux a été victime de la violence programée, dans le second cas de figure, il a fait le choix de l’état de droit (Collaborer avec la justice : le choix de vivre)
Le sommet mafieux dans le Nord de l’Italie : la vidéo
En rapport aux 300 arrestations survenue dans le Nord de l’Itlaie au mois de juillet, voici la vidéo des chefs mafieux calabrais qui élisent leur référent pour le Nord de l’Italie, enjoy :
Côte d’azur mon amour
En ce mois de septembre, les gendarmes des deux côtés des Alpes ont visité Vallauris, ses porteries, sa cité la Zaïne (en photo) et ses citoyens italiens un peu spéciaux. Ces derniers sont sans cesse en déplacement. Puis, à l’issu de leur séjour, ils arrivent sur la « Côte » et jouent au cartes dans les cafés pendant une semaine. Quand on leur demande ce qu’ils font dans la vie, ils répondent qu’ils sont « dans les assurances » (cit)…
Bref, cette semaine, les gendarmes ont arrêté Roberto Cima, 52 ans car il doit purger un peine de 21 ans de prison. Avec son complice Maurizio Chiappa, arrêté en 2008 à Golfe Juan… il aurait assassiné, en 1989, un rival pour le contrôle des activités illicites dans la région Ligurie (cf. Infiltrations mafieuses en France)
D’aprés certaines sources malheureusement très rares en France, à Vallauris, il y aurait une ‘ndrine, une famille mafieuse calabraise. Je cite un extrait de la mission parlementaire d’information sur la délinquance financière et le blanchiment des capitaux :
« J’ai appris, en discutant, de manière officieuse, avec des officiers de police judiciaire, que la mafia calabraise est organisée selon un régime de loges – les cosche. Dans les Alpes-Maritimes, sept cosche sont établies, la cosca mère étant à Juan-les-Pins, et dépendent toutes de la cosca de Vintimille. […] »
Extrait de l’audition de M. Philippe Dorcet, juge d’instruction au Tribunal de grande instance de Nice, devant la Mission, le 9 mai 2001.
Je dédie ce billet à mon père qui m’a permis d’étudier ses sujets. Je me souviens de ce jour de juillet 82 où nous avons rendu visite à un ami à lui. Ce dernier, propritaire d’une pizzaria sur la route de Vallauris, était victime d’une tentative de racket de la part d’amateurs qui n’avaient rien d’italiens…
Chante chante Lupara…
« Là ou passent les Tornicchio, la terre tremble et la lupara chante »
Le 25 juin est une date importante 🙂 mais celle de 2009 ne fut pas joyeuse. Ce soir là, i piciotti (les soldats de la mafia) sont en embuscade derrière des arbres qui entourent un petit terrain de Football. Nous sommes à Crotone, une ville ou les ‘ndrines (familles mafieuses calabraises) ont fait beacoup parlé d’elles ces derniers temps (cf. Opération « Héraclès » à Crotone).
Les tueurs tirent plusieurs coups avec un fusil, blessent une dizaine de personnes et en tuent deux dont un enfant de 11 ans. L’expert en balistique affirme que les auteurs des coups de feu avaient pleinement conscience de toucher d’autres personnes que la cible.
L’objectif de cet acte de violence programmée (cf. Tir aux pigeons ou violence programmée?) était un homme de 35 ans mort sur le coup. Ce dernier, membre du clan Tornicchio et émigré en Allemagne (où la mafia calabraise prospère cf. De San Luca à Duisburg, la faida et la ‘Ndrangheta), était de retour en Calabre depuis 1 ans. Il aurait profité de l’emprisonnement du chef du clan soumis à l’article 41 bis du code de procédure pénale qui prévoit un régime carcéral strict (cf. Bienvenu au royaume de l’impunité) pour assurer des missions de commandement. Le chef aurait alors ordonné son excécution ; logique mais alors pourquoi ce carnage ?
Grâce au écoutes judiciares (que le gouvernement italien veut limiter… cf. 1. « Dessine moi un bunker »), les enquêteurs ont non seulement retrouvé les tireurs mais aussi impliqué le donneur d’ordre qui se serait félicité du massacre car ”dove passano i Tornicchio trema la terra e canta la lupara” (pour « lupara » cf. Guet-apens contre un capo-bastone en Aspromonte). Le carnage est donc justifié dans la logique de la violence programmée comme un message envoyé à toute la population ; la violence étant un moyen de communication mafieux parmis d’autres (cf.Le mafieux, ce grand communicant).
Cette fusillade ressemble donc aux meurtres de 6 Africains au mois de septembre 2008 (cf. « Jammuncenne ») et rappelle que la mafia tuent très souvent des inoncents (cf. La guerre des ‘ndrines de Crotone n’épargne pas les enfants ou Antonino, 3 ans : victime « collatérale ».)
Deuxième « villa scarface » saisie par la justice
L’Italie c’est 4 mafias et les meilleurs outils juridiques pour lutter contre celles-ci. L’état a par exemple à sa disposition la confiscation des biens avec réutilisation à des fins sociales (cf. La confiscation : enjeu politique majeur): l’immeuble du parrain qui devient un centre culturel, l’exploitation agricole du clan qui devient une coopérative avec des ouvriers qui ont un contrat de travail… un chose rare en terre mafieuse (cf. Schiaffo alla mafia).
A ce sujet, ce 5 août, la Garde des finances a saisi des biens mafieux pour une valeur de 10 millions d’euros. Ces biens appartiennent à des membres de la très pussante ‘ndrine (famille mafieuse calabraise) Alvaro de Sinopoli (cf. Violence programmée). Cette saisie fait suite aux opérations déjà menées au mois de mai mais aussi à d’autres plus anciennes (cf. 200 millions d’euros saisis à la mafia calabraise).
Les militaires de la Guardia di finanza ont effectué une enquête patrimoniale d’un simple exploitant agricole de 73 ans et ils ont découvert que ce dernier était propriétaire de 4 luxueuses propriétés. Localisées dans la petite commune de Melicuccà, elles ne figurent même pas sur le cadastre. Situées dans des endroits difficilement accessibles, les militaires les ont repérées en survolant la zone par hélicoptère.
Pour la petite histoire, une de ses villas a été construite sur le modèle de la villa Scarface comme ce fut déjà le cas à Casal di Principe avec la maison de Walter Schiavone, le frère de Francesco dit Sandokan (confusion dans le reportage). A Casal di principe, la villa scarface doit devenir un centre d’acceuil pour handicapés. J’espère que les villas de Meliccucà deviendront un complexe touristique antimafia qu’on puisse profiter d’une des plus belles régions d’Italie.
Election mafieuse dans le Nord : pronunciamento
Au mois de juillet, la police a arrêté 300 mafieux dans toute l’Italie en particulier en Italie du nord. Les enquêteurs italiens nous offrent un photo qui vaut son pesant d’or : « l’élection » du référent pour toutes les ‘ndrines (familles mafieuses calabraises) présentes dans le Nord de l’Italie (cf.300 arrestations : voir reportage de France 24 et 300 arrestations : voir article du Figaro)
A Salute!
300 arrestations : voir reportage de France 24
Près de 3 000 policiers italiens ont mené une vaste opération contre la ‘Ndrangheta à travers l’Italie. Plus de 300 personnes ont été arrêtées, dont le patron présumé de la pègre calabraise, notamment pour meurtre, détention et trafic d’armes. Par Gaëlle LE ROUX (texte) et Alexis MASCIARELLI , correspondant à Rome (vidéo) : cliquez France 24
300 arrestations : voir article du Figaro
Quelque 320 personnes soupçonnées d’être liées à la ‘Ndrangheta, dont certaines appartiennent à la « bourgeoisie mafieuse », ont été interpellées mardi à l’occasion d’une opération dont l’ampleur est sans équivalent depuis les années 90… L’enquête débuta par l’assassinat d’un capo-bastone à Milan puis par une Exécution mafieuse en Lombardie
lire l’article de Marie Herbet, le Figaro
Pour info : « la bougeoisie mafieuse » = réseaux : mafieux + complices
Chaque mafieux agit au sein d’un ensemble de relations complices. L’ensemble forme, pour chaque mafia, un réseau qui représente environ une centaine de milliers de personnes. Celles-ci appartiennent au monde de la politique, de l’entreprise et des professions libérales :
« Le système relationnel mafieux est composé de rapports de parenté, d’amitié, d’intérêt, de contiguïté et de complicité. Ce réseau s’affirme dans des conditions de développement comme de sous-développement économique. Ces relations composent un corps social hiérarchiquement organisé. Les catégories sociales les plus pauvres représentent le bassin de recrutement de la main-d’œuvre pour les mafias. Les sommets de l’organisation mafieuse sont capables de sceller un pacte scélérat avec les plus hautes sphères du pouvoir politique et économique, la haute société ».
Le tout forme un corps social, un « club privé », que le sociologue Umberto Santino qualifie de « bourgeoisie mafieuse ».
Santino (Umberto), L’alleanza e il compromesso (mafia e politica dai tempi di Lima e d’Andreotti ai nostri giorni), éditions Rubbettino, Soveria Manelli, 324 pages, 1997, pp. 5-9.
« Victor : nettoyeur »
« Les cochons dévorent rapidement les corps à condition de les mettre à la diète pendant une semaine«
Depuis 2001, un tueur de la ‘Ndrangheta collabore avec la justice. Il est donc un collaborateur de justice et non un « repenti » puisqu’il ne se repent de rien. Il change de vie et passe du côté de la légalité et de l’état de droti. Cela se révèle utile car depuis 2001, on connaît les secrets des ‘ndrines (familles mafieuses calabraises) de Cosenza (cf. Opération Terminador).
Entre 1998 et 2000, des chefs de famllies de la zone décidèrent de s’unir en confédération afin de se répartir les appels d’offre de l’autoroute A3 (en photo) et de faire le mènage. La nouvelle stratégie avait obtenu l’aval de la ‘ndrine Mancuso de Limbadi très influente dans la région (cf. ‘Ndrines, armes et contrôle du territoire). Il s’agit encore d’une information précieuse obtenu grâce à un colloborateur de justice, le « contabile » (« comptable » de l’organisation en question).
Les ‘ndrines faisaient appel à des tueurs professionels. En 2000, le tueur collaborateur de justice en question a participé à un massacre à la kalashnikov sur la place d’un village (deux morts et un blessé). En 1998, il avait assassiné un jeune vendeur de drogue « nommé Chiarello » puis l’avait découpé en morceau à la hache. Le soldat de la mafia était devenu « un ange de la mort » capable de désosser les cadavres, les dissoudre dans l’acide ou de les faire rôtir dans des barils de naftaline. Mais le meilleur moyen de ne pas laisser de trace était l’utilisation des cohons!
« Ils mangent tout y compris les cheveux, en une demi heure, il ne reste plus rien« .
Heurseusement que « Victor le nettoyeur » (Nikita) est devenu collaborateur…
Fait à partir de l’article d’Arcangelo Badolati de la Gazzetta del sud
4. Organisation mafieuse : « j’appelle la Province »
Poursuivons l’analyse des écoutes judiciaires avec le thème de l’organisation mafieuse. Les clans calabrais sont souvent décrits comme des entités autonomes. Saut que depuis 1991, les ‘ndrines (familles mafieuses calabraise) dans la province de Reggio (voir la carte) se sont doté d’une « commission » (comme en sicile cf. Opération Persée, le dieu qui décapita la méduse…), une chambre de compensation chargées de régler les litiges entre les clans.
Ici, les mafieux nomment cet organe d’arbitrage « la province » confirmant ainsi que les mafias sont des acteurs politiques…
P.G.: « Les choses ne sont pas bien avancés »
M.R.: Eh!
P.G.: « Nous on est (inaudible), on leur a dit que nous on a avait les choses comme ils faut ».
M.R.: Eh!
P.G.: « Et alors, on leur dit, asseiez vous que je dois te dire, là, l’histoire c’est cà,… et si cela ne vous convient pas , on en parle et on fait une (inaudible) [ même si je pense qu’il parle d’une « réunion » ndr]
M.R.: « C’est claire »
P.G.: « On en parle où il y a d’autres hommes [d’honneur – mafieux ndr] ».
M.R.: « C’est claire »
X : (inaudible)
M.R.: « Mais, si ils veulent parler, on appelle LA PROVINCIA comme responsable et on parle »
P.G.: (inaudible)
M.R.: « Et celui qui a raison... »
P.G.: (inaudible)
Voix non comprhéensibles
M.R.: « Avec les hommes [entre mafieux ndr]… »
P.G.: « Avec LA PROVINCE, on a le le responsable [autorité compétente pour arbitrer les litiges ndr]… » »
FIN
PS : ces écoutes sont disponibles sur le site du journal laRepubblica (http://www.repubblica.it/cronaca/2010/05/18/news/boss_intercettati-4145994/) ce qui démontre que l’Italie est une démocratie transparente. Mieux, elle est un état de droit qui dispose des meilleurs outils juridiques pour lutter contre le crime organisé (cf. Lobbying antimafia à Bruxelles).
Attention, le gouvernement actuel veut limiter les écoutes judiciaires (article du Point) car « les mafieux aussi ont droit à une vie privée » Daniela Santanche, membre du gouvernement.