Articles avec le tag ‘justice’

La nostalgique Serbie : en mouvement vers l’Union !

En ce 24 mars 2009 à Belgrade, deux jours après « l’anniversaire » des bombardements de 1999, l’ambiance est lourde1. Les manifestations nationalistes succèdent à celles des pacifistes. En passant devant le ministère de la Défense qui porte encore les stigmates des missiles américains (photo à gauche) on prend conscience que la Serbie est encore entre le passé et l’avenir. Il s’agit pourtant de résoudre cette contradiction pour que cet Etat intègre l’Union européenne, et ce dans l’intérêt de tous les pays membres.


Une Serbie, des territoires

Le nord du pays est animé par une capitale moderne et bouillonnante ; Belgrade, ville d’1,5 millions d’habitants. Le nord du pays est aussi caractérisé par la riche Voivodine aux multiples ethnies et aux sept langues. Le Sud du pays est un territoire sous-développé. En dépit des 64 millions de dollars versés par le gouvernement serbe depuis 2001 pour moderniser les infrastructures, le Sud connaît un important retard économique et un chômage endémique (30% de plus que la moyenne nationale)2. Dans le Sud, les tensions ethniques sont toujours vivaces. Le fossé qui sépare le Nord du Sud menace dangereusement l’unité nationale. Réduire les disparités entre les territoires est un enjeu majeur pour intégrer l’Union européenne. Si son action a permis des progrès au Portugal entre le Nord et le Sud ou entre l’Irlande et la Grande Bretagne, ce doit être possible en Serbie aussi.

La Serbie au cœur des Balkans

A l’échelle de la région, la Serbie est en retard sur ses voisins slovènes et croates. Si les longs délais pour intégrer l’Union ne posent pas de problèmes aux citoyens serbes, le maintien du visa pour les citoyens est vécu comme une humiliation. En franchissant les frontières au mois de mars dernier, j’ai pu me rendre compte des nombreux contrôles aux frontières croato-slovènes et serbo-croates, qu’on les traverse dans un sens ou dans l’autre. Ces quatre contrôles sont longs et peu probants en matière de sécurité car les bagages n’ont pas été fouillés.

Dans la mesure où la circulation des personnes est une donnée fondamentale pour le progrès des mentalités. Il semble que le maintien de visas pour le citoyen ressemble à une punition pour les errements du passé. Les autres États de la région ne jouent pas l’apaisement. Depuis 2006, le Monténégro a officiellement proclamé son indépendance et la dissolution de la communauté d’États de Serbie-et-Monténégro mais cet État est devenu un havre pour la diaspora Russe dont la réussite dans les affaires est souvent douteuse. La Macédoine, candidate à l’entrée dans l’Union mais devant régler le problème de son nom avec la Grèce… ne joue pas la carte de l’avenir en nommant son aéroport « Alexandre le Grand » et en prônant une politique populiste « d’antiquisation » de la société. Il s’agit de donner à la Macédoine des allures de grande nation Antique. Or, on sait que les projets de grande nation sont des motifs d’embrasement dans les Balkans. On ne peut que se féliciter de la position de la France prônée par le ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire, M. Besson, visant à soutenir la libéralisation des visas macédoniens à condition qu’il en soit de même pour les citoyens serbes, ce que le commissaire Jacques Barrot a annoncé le 7 mai dernier.

Enfin, à bien des égards, la situation en Bosnie, partagée en plusieurs républiques et n’ayant ni armée ni police commune, est plus inquiétante.

Le Kosovo au « centre » du monde

Avec objectivité et sans arrière-pensée, au Kosovo, le droit international n’est pas respecté. En effet, la résolution 1244 du 10 juin 1999, reconnaît l’appartenance du Kosovo à la République fédérale de Yougoslavie puis de l’Etat et Serbie et Monténégro (2003). Depuis ce texte, le Kosovo est géré par la MINUK administrée par l’ONU (18 000 soldats de la KFOR-OTAN). Or, le 17 février 2008, le Kosovo a déclaré unilatéralement son indépendance. Cette indépendance n’a pas été reconnue par Belgrade et la communauté internationale est très divisée. Comparaison n’est pas raison mais que se passerait-il si le Pays basque déclarait unilatéralement son indépendance ? Depuis, les tensions perdurent. Au mois de mars dernier, des journalistes ont révélé que des politiciens kosovars auraient versé un pot-de-vin de 2 millions de dollars à des officiels des Maldives pour que cet État reconnaisse l’indépendance du Kosovo3.

Il est vrai qu’aujourd’hui les deux communautés (serbe et kosovare) ne peuvent réellement vivre ensemble. Une séparation s’impose mais en tenant compte de la sécurité de chacun. Rappelons qu’en 2004, des pogromes anti-serbes ont eut lieu. Seule l’Union européenne peut soutenir la paix sur le modèle irlandais. La différence avec le Kosovo est qu’il est au cœur d’une confrontation géopolitique mondiale entre la Chine et la Russie d’une part et les États-Unis et l’Europe d’autre part (comme on peut le voir sur la carte de la reconnaissance du Kosovo dans le monde :

Kosovo      États reconnaissant formellement l’indépendance du Kosovo      États prévoyant de reconnaître formellement le Kosovo      États ayant exprimé leur neutralité ou ayant reporté la reconnaissance du Kosovo      États s’étant déclarés préoccupés par une déclaration d’indépendance unilatérale      États ayant déclaré ne pas reconnaître l’indépendance du Kosovo      États n’ayant pas exprimé de position

La criminalité en Serbie, une tendance lourde en évolution ?

A l’image de l’Italie, le crime organisé semble être une tendance lourde de la Serbie, située au cœur des Balkans. « Depuis son émergence en Occident au début du siècle et quel que soit le contexte politique régional le trafic d’opiacés est resté une donnée constante sur les routes des Balkans. Il fait intervenir une pluralité d’acteurs, politiques et économiques, balkaniques ou pas, regroupés en réseaux d’intérêts conjoncturels ».4 La Serbie est donc toujours un carrefour pour la criminalité européenne. Les mafias italiennes, russes, chinoises et bulgares ont désormais choisi Belgrade comme lieu de rencontre.

Par ailleurs, l’Europe reste impressionnée par l’assassinat du premier ministre Zoran Djindjic au mois de novembre 2003. Pour autant, à ce jour, les membres du commando ont été condamnés par la justice, ce qui témoigne d’une ambiance assez sereine. De manière unanime, les interlocuteurs interrogés sur place estiment que depuis la réaction de la justice, on respire un autre climat à Belgrade. Avant, les « pistolets » étaient en évidence à la ceinture ou sur le tableau de bord des rutilants véhicule 4×4. Aujourd’hui ces comportements sont caducs.

Le ministère de l’Intérieur dans son livre blanc affirme qu’il y aurait une trentaine de groupes à Belgrade, à Novi Sad, Novi Pazar, Jagodina, Nis, Zlatibor et Presevo, mais aussi à Bujanovac au Kosovo. Les groupes de Zemun (Belgrade) et de Novi Beograde (qui auraient de solides liens avec les mafias de la zone et les cartels latino-américains) sont les plus importants. Aujourd’hui, ce qu’est Belgrade pour la Serbie, Novi Beograde l’est pour la capitale.

En revanche, nous nous permettrons de douter des déclarations du ministre de l’Intérieur selon lesquelles ces groupes ne seraient pas liés à une criminalité économique et financière. Leur influence sur l’axe Belgrade-Zlatibor-Crna Gora est importante dans le racket et l’enlèvement de personnes mais aussi dans les secteurs des travaux publics et du recyclage de l’argent sale. Les entreprises de sécurité privées et les officines de paris ont pignon sur rue. Il est fort probable qu’elles financent une partie des campagnes électorales, ce qui renvoie la classe politique à ses responsabilités (voir dernier chapitre).

Si la fin de l’impunité « comportementale » est un progrès, le Ministère de la justice a des difficultés à incriminer les leaders criminels car les preuves font défaut. Or, la justice est la seule arme efficace pour combattre le crime organisé.

Le problème de la justice face au crime organisé et à la corruption

Le corps des magistrats est décrié comme « corrompu » mais en réalité, le problème est que les magistrats de province traitent souvent un trop petit nombre d’affaires. Ils restent aussi généralement toute leur carrière dans la même ville, voire le même tribunal. Les tribunaux sont majoritairement de petite taille et les magistrats n’ont pas toujours une activité suffisante garantissant leur compétence et l’efficacité de la Justice. Ils peuvent aussi avoir des liens trop proches avec certains de leurs justiciables qui les empêchent de rendre une justice impartiale. La magistrature n’est pas sélectionnée ni formée uniformément. Les différences d’un praticien à l’autre sont importantes ; certains étant très compétents et d’autres moins. S’ils manquent aussi parfois de spécialisation il doit être relevé qu’une section spéciale pour le crime organisé a été créée en 2003. Il manque encore un concours pour la magistrature, prévu mais dont le projet de loi n’a pas encore été soumis au Parlement5. Afin de pallier à ces défauts du système, le gouvernement vient de faire voter plusieurs textes visant à réformer la justice

– modification de la carte judiciaire et notamment le passage de 134 à 31 tribunaux de base,

– instauration d’une évaluation des magistrats,

– modernisation des statuts et augmentation de l’autonomie des conseils supérieurs des juges et procureurs par rapport aux autres pouvoirs,

– loi sur la confiscation des biens saisis à la criminalité organisée,

– obligation de déclaration de patrimoine pesant sur les fonctionnaires,

– instauration d’une responsabilité pénale des personnes morales,

– loi sur les marchés publics,

– création de l’agence de lutte contre la corruption.

Une loi transformant le Centre de formation judiciaire, qui ne délivre actuellement qu’une formation continue, en réelle école délivrant une formation initiale à laquelle on accèdera par concours est par ailleurs en préparation au ministère de la Justice.

La réforme dans les textes n’est qu’un début. Il faudra juger les faits. Les derniers gouvernements ont montré une certaine capacité à faire adopter des lois sans toujours en anticiper les conséquences ni donner l’impression de se soucier réellement de leur mise en œuvre. L’application de la nouvelle carte judiciaire, par exemple, exigera des moyens importants en logistique, budget et formation, pour que le remède ne soit pas pire que le mal.

Le gouvernement actuel donne des gages de bonne volonté à l’Union européenne en créant les institutions censées garantir l’Etat de droit ; il lui faut maintenant leur donner les moyens nécessaires (bâtiments, budget, personnels…) et y nommer des personnes réellement indépendantes, sauf à se décrédibiliser en les privant de toute efficacité. C’est semble-t-il le manque de moyens et de réelle volonté politique qui a poussé la personne pressentie pour diriger la future agence de lutte contre la corruption, à décliner cette offre. Par ailleurs la création d’une police judiciaire travaillant sous le contrôle des magistrats, n’est pas encore à l’ordre du jour.

Enfin, la justice n’est pas la seule institutions ayant des fonctions régaliennes à devoir lutter contre la corruption. La police, les douanes et l’armée sont attendues sur le terrain des réformes mais comme dans toute démocratie, le progrès dépend de la classe politique

La classe politique, véritable frein au changement

Le système parlementaire serbe fait la part belle aux partis même petits, qui peuvent exercer un chantage néfaste. Les élections législatives se déroulent au scrutin de liste à la proportionnelle à un tour, empêchant l’émergence d’une majorité forte et efficace. Lors de la dernière législature6, le parti des retraités a obtenu un poste de vice-premier ministre, pour quelques députés qui peuvent renverser la majorité, et fait pression sur le gouvernement pour augmenter les retraites, ce qui grèverait le budget en période de crise et créerait une nouvelle contrainte pour l’adhésion de la Serbie à l’Union. Pire, au début de chaque mandature, les députés nouvellement élus remettent leurs mandats à la direction de leur parti (une lettre de démission signée en blanc), leur enlevant toute velléité d’indépendance.

Par ailleurs, les députés sont attendus sur le terrain des réformes, en particulier celle des permis de construire qui voit les citoyens demander une dizaine d’autorisation7. Le rallongement des délais incite les citoyens à de tout petits actes de corruptions qui conditionnent les mentalités. Certains politiciens prônent cette réforme mais n’arrivent à obtenir gain de cause.

A une autre échelle, les soupçons de corruption des partis politiques sont assez élevés et ce parce que leur financement reste occulte malgré les lois récentes prises en la matière. La corruption a une influence sur la vie publique en Serbie et donc incidemment sur l’institution judiciaire, nommée par le Parlement, lui-même contrôlé par les partis.

Plus généralement, le comportement des hommes politiques vis à vis de la justice est décrié comme ne respectant pas son indépendance y compris au niveau institutionnel8, alors que celle-ci n’a pour but que de donner aux citoyens une garantie démocratique minimum. Il s’agit peut-être à l’heure actuelle, de l’élément le plus défavorable à la Serbie dans sa route vers les standards européens.

L’intégration de la Serbie sera longue mais freiner ce processus est contre-productif. L’Europe agira plus efficacement contre la classe dirigeante et influera sur les mentalités une fois que la Serbie sera dans l’Union européenne. Il ne sert à rien de stigmatiser la corruption en Serbie alors qu’elle semble encore plus prégnante en Bulgarie, pays déjà dans l’Union. La Serbie possède des ressources. Un tour sur le marché « asiatique » permet de voir que les minorités et en particulier les Rroms sont mieux considérés qu’en Roumanie, pays déjà dans l’Union9. Enfin, si l’Europe n’est pas la panacée à tous les problèmes des citoyens, elle a le mérite d’avoir imposé la paix; ce dont les Balkans ont un impérieux besoin sur le long terme.

1 Sur les lieux du 24 au 29 pour rencontrer des acteurs locaux.

2 Belgrade insight, friday, march 20 au thursday march 26, 2009 p. 3.

5 Le futur concours pour l’entrée dans l’école de formation devra, pour être réellement démocratique, être accessible à tout étudiant ayant obtenu son diplôme avec des épreuves anonymes et écrites, ce que toutes les universités ne proposent pas encore, et sans épreuve de pré-sélection effectuée par des personnes non indépendantes du pouvoir exécutif (pour devenir magistrat actuellement, il faut, avant d’être désigné par l’Assemblée nationale, être pendant quelques années assistant d’un juge ou procureur, ce qui ne peut se faire qu’avec l’accord du président du tribunal ou procureur de la République)

6 Suite à la crise gouvernementale provoquée par la déclaration d’indépendance du Kosovo, le 11 mai 2008, des élections législatives anticipées ont permis l’instauration d’un gouvernement pro-européen.

7Issu de la mentalité communiste (ou tout le monde devait avoir un petit emploi même sans grand intérêt), la pratique des petits des emplois perdure, multipliant les risques de corruption.

8 Une loi adoptée fin 2008, mettant fin à toutes les fonctions judiciaires au 31 décembre 2009 et prévoyant la redésignation, par le nouveau Conseil supérieur des tribunaux, de tous les juges, est contestée par ces derniers comme portant atteinte à leur inamovibilité et donc à leur indépendance, prévue par la Constitution.

9 Sur deux marchés couverts modernes, les trois communautés asiatiques, roms et serbes ont des stands officiels, ce qui témoigne d’un climat différent de celui rencontré dans d’autres pays. Pour connaître la situation des Roms, première minorité de l’Union Européenne : http://www.romeurope.org/

Collaborer avec la justice : le choix de vivre

Le 25 mars dernier, sur le marché du quartier San Pasquale de Bari, deux sicaires s’approchent d’Orazio Porro, 53 ans. Ce dernier sort un couteaux mais il est trop tard. Il reçoit trois balles et décède sur le coup. Un clan du centre ville de Bari vient de commettre un acte de « violence programmée » contre un mafieux pris dans ces contradictions. (Voir le cas d’un autre ex-repenti assassiné).
La victime, un mafieux de la Sacra corona unita, la mafia des Pouilles, est un ancien collaborateur de justice, (un mafieux « repenti » protégé par l’Etat). Dans les années quatre-vingt dix, Orazio Porro était le bras droit du boss Guiseppe Cellamare. Tous les deux, acteurs majeurs du trafic de cigarettes transitant par les Balkans. étaient en « cavale » au Monténégro où ils ont été arrêtés.en 1998. Mais avant d’être arrêté, Orazio Porro avait tenté d’assassiner le boss rival et honni Giuseppe De Felice, surnommé « Pinuccio il napoletano ». Pour cette tentative de meurtre, un des soldats d’Orazio Porro fut balafré en prison. Orazio Porro décide, alors, de passer du côté de la légalité. Il témoigne contre son clan au procès. En 2006, la cour d’assise lui retire le droit d’être protégé par l’Etat car ce témoin n’aurait pas tout dit sur un massacre survenu en 1990. Au mois de janvier, de 1990, via Isonzo, trois personnes ont été tuées au cours d’une tentative d’assassinat contre le boss du vieux Bari Antonio Capriati qui s’est servii des trois victimes comme bouclier…). Une fois sorti de prison en 2008, Orazio Porro se serait caché pour se protéger avant de revenir à Bari en 2009. Là, les sources divergent. Soit, il aurait commis une tentative de racket ou bien il aurait été apperçu dans les allées du parquet de Bari, ce qui signifie qu’il voulait être réintégré dans le programme de protection des anciens mafieux (« repentis »).Orazio Porro aurait mieux fait de tout dire. Il serait aujourd’hui, en sécurité, dans une commune du Nord de l’Italie, sous un faux nom et avec sa famille. Depuis 1992, aucun collaborateur de justice sous protection de l’Etat italien n’a été assassiné par la mafia. Orazio Porro aurait pu faire le choix de la vie et de la légalité (Cf. Le « repenti » rétablit l’Etat de droit en Italie ). Ses hésitations lui ont été fatales.
A contrario, l’auteur de l’assassinat de la semaine dernière s’est livré à la police ( Cf. Prison à vie ou exécution sommaire? ). Il a fait le choix de la vie… en prison.
Je dédie cet article à mon frère le « balafré » de Grasse.

Antimafia de droite

Angela Napoli mafia

Angela Napoli

La députée Angela Napoli, du parti « Alliance Nationale », un mouvement néofasciste, soutient toutes les initiatives visant à éradiquer la criminalité en Italie. Angela Napoli est membre de la commission parlementaire antimafia. Récemment, elle a interpellé le ministre de la justice sur les révocations de l’article 41 bis. L’article 41 bis du code procédure pénale prévoit un régime carcéral strict pour les chefs mafieux. Cet isolement de la société permet de limiter l’influence des chefs sur leur famille. D’après la députée Napoli, de nombreux mafieux ont bénéficié de la révocation de cette mesure et sont désormais en mesure de communiquer avec leurs soldats.
Elle prend l’exemple du boss de Cosenza Franco Penna et de son bras droit Gianfranco Ruà. Dans le cadre du procès « missing », le capobastone est accusé de 12 homicides mafieux. Surtout, il a déjà été condamné à la prison à vie ! Pourtant, le tribunal de l’application des peines a révoqué les mesures d’isolement strict à l’encontre de ces deux chefs de ‘ndrine (la famille mafieuse en Calabre). Ces révocations s’ajoutent aux libérations des chefs mafieux quand les délais de leur détention provisoire sont dépassés (art.14). Ces décisions ridiculisent l’Etat italien. La conséquence réside dans le fait que les citoyens ne peuvent collaborer avec l’ Etat jugé faible contre des mafias qui ont beaucoup de pouvoir. La députée demande un contrôle de l’application des meures rendues par les tribunaux d’application des peines.
En Italie, il existe bien une tradition antimafia de droite. Le juge Falcone était de gauche et son meilleur allié était le magistrat Paolo Borsellino dont les sensibilités politiques étaient identiques à celles de la député d’Alliance Nationale (droite radicale). Cependant, les hommes politiques de droite « antimafias » sont généralement étouffés par les affairistes, par les « transformistes » (ceux qui changent de camps) et par les complices directs de la mafia. Ces trois catégories de politiciens forment une majorité au sein de la droite italienne. La députée Napoli est l’exception qui vient confirmer la règle.

L’Etat contre la Camorra

Lundi 5 mai 2008, trois cents carabiniers, soutenus par une brigade cynophile et un hélicoptère, ont arrêté quinze personnes appartenant au clan Graziano qui opère dans la province d’Avellino. Ces personnes sont accusées d’association mafieuse, d’extorsions et de conditionnement de suffrage électoral. En 2005, au cours du renouvellement du conseil municipal de Quindici, les hommes du clan auraient fait élire des complices. En 2007, les carabiniers avaient arrêté le capo-clan, Felice Graziano.
Depuis 40 ans, le clan Graziano et le clan Cava se livrent à une faida, un cycle de vengeances sans fin. Ces dernières années, le clan Graziano avait tendu une embuscade à trois femmes du clan Cava en les assassinant.

Face à la Camorra, la police fait sa part du travail. La justice est, quant elle, souvent « débordée ». Par exemple en 2007, les policiers arrêtent deux chefs de clan, les frères Russo qui opèrent à Nola, une commune située aux pieds du Vésuve. En an un, les enquêtes mettent en cause sept clans et 122 personnes. Les 41 juges d’instruction se révèlent insuffisants. En raison de la longueur de telles instructions, il existe un grand risque que les accusés soient libérés. Les délais de leur détention provisoire expirent bientôt. Des centaines d’écoutes téléphoniques sont encore en attente d’être validées comme preuve.

Conclusions :
La mafia ne respecte pas les femmes.
Dans un pays « garantista », c’est-à-dire où les droits de la défense sont démesurément supérieurs à ceux des magistrats, les mafias sont avantagées.
Tous les partis politiques, ceux de gauche comme ceux de droite, sont responsables de cette situation.

« La magistrature ne sert à rien! »

Le 29 février 2008, Giuseppe Riina a été libéré de prison. La photo à gauche représente Giuseppe Riina quittant la prison de Sulmona dans la région des Abruzze.
Celui-ci n’est autre que le troisième fils de Salvatore, Toto Riina, le chef de la mafia sicilienne de 1983 à 1993 (cf.Toto Riina commande la mafia sicilienne de sa cellule!).

Au cours des années 2000, les policiers avaient placé des micros dans la voiture du jeune Riina. L’étude des enregistrements ne laissait planer aucun doute. Giuseppe Riina tentait de reprendre en main une « cosca », un clan mafieux. En 2004, il avait été condamné en première instance pour association mafieuse. Depuis, Giuseppe Riina attendait le procès d’appel. Parce que les termes légaux de sa détention provisoire étaient dépassées, et conformément aux règles de droits, la Cour de cassation l’a libéré. Giuseppe Riina est, certes, interdit de séjour à Palerme. Il doit, certes, signer au commissariat les lundi, mercredi et vendredi. Il n’a, certes, pas le droit de fréquenter d’autres personnes déjà condamnées par la justice. Il n’a pas, non plus, le droit de sortir entre 20 heure le soir et 7 heure du matin. 

L’ensemble de ces mesures n’a jamais empêché un mafieux d’exercer ses prérogatives. En se rendant au commissariat, il ridiculise l’Etat incapable de le priver de liberté. Puis, Giuseppe Riina compte faire condamner l’Italie par la Cour européenne des droits de l’homme pour la longueur de son procès. Et, comme nous vivons dans des Etats de droit; le fils de plus sangunaire des parrains va gagner.

L’Etat itatlien boira, alors, le calice jusqu’à la lie; se décrédibilisant auprès d’une population sicilienne souvent fataliste.          
Le procureur national antimafia, Piero Grasso ne s’y est pas trompé en affirmant qu’en Italie, « les magistrats ne servent à rien ». Dans ce pays, les forces de l’ordre font un travail remarquable pour arrêter les mafieux. Cependant, la justice italienne, lente et empêchée par les politiques, n’arrive pas à mettre les mafieux hors d’état de nuire. 

L’impuissance relative de la justice est le principal allié des mafias italiennes.

Le jeux des sept erreurs mafieuses

Jouez avec moi. Trouvez l’erreur au sein des multiples arrestations :

  • Le 07 avril 2008, la police a arrêté neuf personnes proches du clan Santapaola de Catane. Ces personnes sont accusées d’extorsion de fonds et d’usure. Elles ont prêté 25 000 euros à un commerçant qui devait rembourser cette somme à des taux d’intérêt variant entre 72 et 120% par an. Parmi les personnes arrêtées, figure un policier de 46 ans qui serait intervenu en faveur de son frère impliqué dans les opérations d’usure de la cosca, la famille mafieuse en question.
  • Le 8 avril 2008, la police a arrêté une avocate accusée d’avoir favorisé le boss Giuseppe Falsone. Ce dernier, en fuite, serait le chef de la mafia d’Agrigento.
  • Le 16 avril 2008, la direction antimafia a arrêté un géomètre de 53 ans. Ce fonctionnaire du conseil général de Caltanissetta est accusé de corruption, de concussion et extorsion de fonds contre trois entreprises du bâtiment. Il recevait de l’argent et du matériel en échange de d’attribution de travaux sur les routes départementales. Les enquêteurs le pensent lié à une cosca de la zone.
  • Vendredi 18 avril 2008, la police a arrêté Luigi Distatefano, 34 ans, présumé chef de la puissante cosca Santapaola de Catane.
  • Le 22 avril 2008, un entrepreneur d’Agrigento a dénoncé la personne qui lui demandait le pizzo, l’impôt mafieux. Le racketteur, âgé de 31 ans , appartiendrait à la cosca de Porto empedocle dirigée par le boss Gerlandino Messina. Ce dernier est latitante, en cavale. Le racketteur est lui-même entrepreneur et il était conseiller municipal de la ville de Realmonte.
  • Le 23 avril 2008, un entrepreneur de Palerme a dénoncé son extorqueur. Ce dernier était chef d’entreprise. Les complices de cet entrepreneur avaient déjà été arrêtés parce qu’ils figuraient sur des pizzini de Salvatore Lo Piccolo.
  • Le 23 avril 2008, la police de Caserta en Campanie a arrêté une vingtaine de personne proches du clan Belfiore. Ce clan de la Camorra contrôle la ville de Marcianise et les communes avoisinantes. Parmi les complices du clan, il y aurait des medecins, des agents de la police pénitenciaire ainsi que deux femmes.

    L’erreur est au chapitre 4 (à la ligne 17). La personne arrêtée est seulement un mafieux… Pour les autres opérations, les personnes arrêtées sont des entrepreneurs voir des fonctionaires ou bien ils exercent des professions libérales. Sans ces complices, la mafia n’est rien. C’est pourquoi les mafieux et leur complices forme un corp social : « la bourgeoisie mafieuse » (U. Santino Csd). Pour comprendre ce concept, vous pouvez lire les articles suivants (art. 8. 1621.25. 33. 43.44).

Un « mouchard » au tribunal de Reggio en Calabre

Mardi 22 avril 2008, des ouvriers restaurent une salle du tribunal de Reggio en Calabre dont on peut voir la photo à gauchet. En réalité, ce sont des carabiniers du ROS spécialisés dans la lutte contre le crime organisé. Là, ils découvrent un « micro espion ». L’instrument d’écoute est rudimentaire. Sa portée n’excède pas 20 mètres. Cependant, le « mouchard » était placé dans un endroit stratégique ; dans la salle où le procureur antimafia Nicola Gratteri procéde aux interrogatoires et aux réunions avec les forces de l’ordre.

Nicola Gratteri est un magistrat spécialisé dans la lutte contre la ‘Ndrangheta. Il est l’auteur, avec Antonio Nicaso, d’un livre, Fratelli di sangue (Frères de sang) qui dévoile les arcanes de la mafia calabraise. En ce moment, Nicola Gratteri enquête sur le massacre de Duisburg (art. 6) et sur le sénateur Sergio De Gregorio. Celui-ci est mis en examen pour association mafieuse à des fins de blanchiment. Leader du mouvement des Italiens résidants à l’étranger, ancien président de la commission de la défense, aujourd’hui, il est membre de la coalition de centre-droit de Silvio Berlusconi.
Comme le « mouchard » fonctionne à l’aide une batterie qu’il faut recharger régulièrement, les policiers et les magistrats recherchent, maintenant, une « taupe » au sein du tribunal.

La mafia et le monde de la santé

Le 18 avril 2008, Giovanni Mercadante, ancien conseillé régional de Forza Italia, le parti de Silvio Berlusconi (cf. sommet de la bourgeoisie mafieuse),  a obtenu la résidence surveillée.
Il était pourtant placé en détention provisoire dans le cadre de sa mise en examen pour association mafieuse. D’après les magistrats, Mercadante, n’est pas complice de la mafia, il en fait partie!
Giovanni Mercadante été libéré pour raisons médicales. Il souffrirait d’une grave dépression et il n’existe pas d’établissement pénitencier de ce type en Sicile.

Conclusion :  les hôpitaux publics dans le sud de l’Italie sont dégradés parce que la mafia et ses complices médecins détournent les fonds publics (cf. Contrôle judiciaire contre Bourgeoise mafieuse). Lorsque la magistrature poursuit un des responsables, elle le libère parce que le système de santé est défaillant…

Breaking news : en 2012 Giovanni Mercadante a été acquitté après avoir été condamné en appel pour concours externe en association mafieuse.

 

De la saisie à la confiscation; de la mafia à l’Etat?

palmi mafiaCette semaine, la compagnie de la Garde des finances de Palmi, dans la province de Reggio (sur la carte à gauche), a saisi et confisqué des biens appartenant à la ‘ndrine Romola. Cette famille mafieuse serait liée à la ‘ndrine Parrello. A Palmi, sur la côte ionniene dans le golf de Gioia, les ’ndrines Parrello et Gallico  (cf.Pâques en Calabre) se disputent la leadership du locale de Palmi. Le locale est une circonscription mafieuse en Calabre.

La confiscation, c’est à dire la saisie définitive, concerne un immeuble en front de mer et une importante entreprise de réparation de bateaux. L’ensemble de ces biens est estimé à 300 000 euros. La valeur des saisies provisoires s’élèvent à 1 millions d’euros Chaque année, les forces de l’ordre saisissent 7% des biens mafieux. La confiscation définitive est estimée à seulement 3%. Enfin, la réutilisation de ces biens posent de grandes difficultés à l’Etat italien. Dans le cas présent, que faire de l’entreprise nautique si personne n’ose reprendre activité commerciale? La réutilisation de biens mafieux est une arme capitale dans la lutte contre les mafias. La confiscation fait reculer l’impunité à condition qu’il y ait une volonté politique de réutiliser le bien. La spécialité des politiciens complices de la mafia est de laisser dépérir le bien saisi. La population se rend compte alors que l’Etat est impuissant et elle se plie au pouvoir de la famille mafieuse…

Un ancien ministe de Berlusconi condamné

L’ancien ministre de la santé de Silvio Berlusconi au cours de la législature 2001-2006, a été condamné à 3 ans de prison. Girolamo Sirchia, sur la photo à gauche, médecin chef de l’hôpital de Milan, aurait reçu des pots-de-vin. En échange, il aurait attribué des appels d’offres de fournitures médicales à des sociétés privées.
Girolamo Sirchia est présumé innocent et a fait appel. Il rejoint tout de même la longue liste des politiques de centre-droit condamnés par la justice.

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