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La mafia napolitaine et les Roms
Le 13 mai, une vague de violence s’est soudain abattue sur les Roms qui vivaient dans le quartier de Ponticelli à Naples. Leurs camps, dont les occupants avaient auparavant été vidés par la police, ont été mis à sac et incendiés par les habitants du quartier. Vengeance populaire «justifiée» par la tentative d’enlèvement, deux jours plus tôt, d’un bébé de six mois par une jeune Roumaine âgée de 16 ans qui s’était échappée d’un foyer pour mineurs. De la Roumaine aux Roms, il n’y a qu’une syllabe.
En Italie, comme partout en Europe, les Roms vivent dans des conditions épouvantables : des camps de fortune installés dans des décharges sauvages ou sous des ponts, îlots de misère au cœur de l’Occident. Ici comme partout, ils vivent – ou plutôt survivent – de mendicité et de la revente de métaux récupérés. Ils sont sédentarisés depuis longtemps, et pourtant continuent de souffrir du regard multiséculaire porté sur les «nomades», Gitans, Tsiganes, Manouches, Roms… Pendant la Seconde Guerre mondiale, les «voleurs de poules et d’enfants» se sont retrouvé aux côtés des Juifs, exterminés dans les camps nazis.Dans le quartier de Ponticelli, plus de 1 500 Roms vivaient dans des «microcamps» constitués chacun d’une dizaine de «baraques». Installés sur des dépotoirs illégaux ou sous des ponts. Or ce quartier de Naples n’échappe par à la mafia. Il est contrôlé par le clan Sarno. Ciro Sarno, le chef de clan est en prison mais ses régents lui obéissent encore.
La mafia a autorisé les Roms à vivre sur son territoire à condition qu’ils paient le pizzo, un impôt mafieux de 50 euros par mois ( Les étrangers : instruments de la Camorra ).
Le clan permettait ainsi aux Roms de faire la manche et de gérer les décharges illégales. Chaque jour, les Roms allaient voir les garages et les entreprises afin de récupérer les batteries et autres matériaux polluants- pour 5 ou 15 euros, les entrepreneurs peuvent se débarrasser de leurs matériaux lourds. Enfin, le clan autorisait les Roms à voler dans les appartements… En revanche, il leur était interdit de fréquenter le centre de Ponticelli, là où les hommes de la Camorra vendent de la drogue.
Que s’est-il passé à Ponticelli pour que la population s’en prenne à eux à deux reprises ( Quand « Rom » rime avec progrom ) ? La mafia est encore une fois derrière la population : parmi les personnes arrêtées par la police lors des manifestations et des dégradations figuraient des femmes de mafieux et des complices de la Camorra aux casiers judiciaires vierges.
Il aura suffit d’une bonne occasion (la tentative d’enlèvement dont les contours restent à clarifier) pour que la mafia passe à l’action. Une action très rentable à plusieurs points de vue. D’abord la mafia ridiculise l’Etat qui n’a jamais été capable d’apporter des solutions à l’immigration roumaine. Aux yeux de la population, en volant au secours d’une petite fille enlevée et en débarrassant le quartier des voleurs de poules, le clan se pose en justicier. La mafia a encore augmenté son capital de consensus social à Naples.
Mais ces expulsions à la sauce mafieuse pourraient cacher une opération de spéculation immobilière. Les terrains incendiés font partie d’un plan d’urbanisation. Depuis moins d’un mois, des appels d’offres ont été lancés pour construire des résidences, des appartements, des écoles et des hôpitaux. Un financement de 7 millions d’euros est déjà disponible. Or, dans le cas où les travaux n’auraient pas pu commencer avant le mois d’août, des gens auraient perdu de l’argent. Qui ?
Les étrangers : instruments de la Camorra
Une tentative d’enlèvement d’enfant serait à l’origine de cette « nuit de cristal napolitaine ». Le 11 mai, une Roumaine de 16 ans aurait enlevé dans un appartement un bébé âgé de 6 mois. La maman, arrivée à temps, aurait fait fuir la jeune Roumaine qui a été arrêtée peu après. Mais, cette jeune étrangère ne semble pas appartenir à la communauté « Rom » de Ponticelli. Elle se serait échappée d’un centre de rétention pour mineurs. Enfin, les habitants de la résidence, où a lieu la tentative d’enlèvement, affirment que la jeune Roumaine n’avait pas de complices. L’enlèvement semble constituer un prétexte pour se défouler sur la communauté la plus pauvre. La police a même dû intervenir le 14 mai pour expulser des étrangers afin d’éviter un carnage. Les enquêteurs ne sont pas dupes. Ils voient dans ce lynchage la main de la Camorra. Les soldats du clan Sarno ont incendié les camps puis ont envoyé leurs femmes et leurs complices, au casier judiciaire vierge, manifester devant les camps des « Roms ». Le lendemain, les enfants du clan récupéraient ce que les « Roms » ont dû abandonner dans leurs baraques. La police a procédé à des contrôles d’identité et il semble que tous les acteurs sont proches du clan Sarno
Bilan :
Depuis plusieurs années, la Camorra exploitait les « Roms » (voir article précédent).
Il aura suffit que les hommes politiques changent de ton envers les immigrés pour que la Camorra comprenne qu’elle a intérêt à faire évoluer sa stratégie.
Il aura suffit d’une bonne occasion (la tentative d »enlèvement dont les contours restent à clarifier) pour que la Camorra passe à l’action.
Ainsi, aux yeux de la population, la Camorra a résolu le problème de l’immigration roumaine. Elle ridiculise l’Etat qui n’a jamais été capable d’apporter des solutions.
La mafia a encore augmenté son capital de consensus social. En venant au secours d’une petite fille enlevée, le clan se pose en justicier.
Enfin, les terrains incendiés font partie d’un plan d’urbanisation. Depuis moins d’un mois, des appels d’offres ont été lancés pour construire des résidences, des appartements, des écoles et des hôpitaux. Un financement de 7 millions d’euros est déjà disponible. Or, dans le cas où les travaux ne commençaient pas avant le mois d’août, l’argent aurait été perdu. Pour qui?
L’Etat contre la Camorra
Lundi 5 mai 2008, trois cents carabiniers, soutenus par une brigade cynophile et un hélicoptère, ont arrêté quinze personnes appartenant au clan Graziano qui opère dans la province d’Avellino. Ces personnes sont accusées d’association mafieuse, d’extorsions et de conditionnement de suffrage électoral. En 2005, au cours du renouvellement du conseil municipal de Quindici, les hommes du clan auraient fait élire des complices. En 2007, les carabiniers avaient arrêté le capo-clan, Felice Graziano.
Depuis 40 ans, le clan Graziano et le clan Cava se livrent à une faida, un cycle de vengeances sans fin. Ces dernières années, le clan Graziano avait tendu une embuscade à trois femmes du clan Cava en les assassinant.
Face à la Camorra, la police fait sa part du travail. La justice est, quant elle, souvent « débordée ». Par exemple en 2007, les policiers arrêtent deux chefs de clan, les frères Russo qui opèrent à Nola, une commune située aux pieds du Vésuve. En an un, les enquêtes mettent en cause sept clans et 122 personnes. Les 41 juges d’instruction se révèlent insuffisants. En raison de la longueur de telles instructions, il existe un grand risque que les accusés soient libérés. Les délais de leur détention provisoire expirent bientôt. Des centaines d’écoutes téléphoniques sont encore en attente d’être validées comme preuve.
Conclusions :
La mafia ne respecte pas les femmes.
Dans un pays « garantista », c’est-à-dire où les droits de la défense sont démesurément supérieurs à ceux des magistrats, les mafias sont avantagées.
Tous les partis politiques, ceux de gauche comme ceux de droite, sont responsables de cette situation.
La Camorra punit les repentis
La victime, Umberto Bidognetti n’est pas connue des services de police et n’a pas de casier judiciaire. Malheureusement pour elle, elle n’est pas hors de la mafia. Premièrement, Le défunt est un cousin de Francesco Bidognetti, un des chefs des Casalesi actuellement en prison. La victime est surtout le père de
Domenico Bidognetti, un élément important du clan des Casalesi qui collabore avec la justice. Non seulement Domnico Bigognetti raconte les secrets du clan à la justice, mais il déclare « la Camorra est un mal absolu et les camorristes sont simplement des bouffons »
Umberto Bidognetti a, donc, été tué à l’âge de 69 ans parce que son fils est un repenti. Le clan des Casalesi punit le traître en tuant son père. On appelle cela une « victime transversale ». Par ailleurs, les chefs envoient un message à l’intérieur de leur clan pour empêcher d’autres collaborations avec l’Etat.
Déjà, le 9 décembre et le 30 avril, le clan Gionta de Torre Annunziata a fait assassiner les deux frères du collaborateur de justice, Aniello Nasto. A chaque fois, des passants ont été blessés pas balles.
Pas de lutte antimafia sans repentis !
La violence mafieuse est un langage.
« Pauvre » Saviano
L’auteur du livre « Gomorra », Roberto Saviano est condamné à mort par le clan des Casalesi (art. 18 ). Les Casalesi sont un cartel de clans qui règnent en maître à Casal di Principe, dans l’arrière pays de Naples (art. 53). Pour sa sécurité, le journaliste, philosophe de formation, vit sous protection policière permanente dans des lieux tenus secrets.
Avril 2008, pendant un mois, il a tenté de louer un appartement dans le quartier de Vomero à Naples. D’après le quotidien il Mattino, un groupe de locataires voisins a refusé la présence du journaliste menacé de mort par la mafia.
En Italie, une importante partie de la population est « gênée » par les personnes qui luttent contre la mafia. Déjà, dans les années quatre vingt, les voisins du juge Falcone se plaignaient du va-et-vient des voitures de police de son escorte. A Naples, on préfère être racketté et crouler sous les ordures plutôt que de vivre avec un homme courageux à ses côtés. En effet, la peur est omniprésente. Ce type d’acte au quotidien constitue une victoire pour la mafia.
C dans l’air avril 2008, 1 minutes 36 secondes sur Saviano :
La mafia napolitaine dans le quartier de Scampia
Lundi 16 avril 2008, il est 16h, dans le quartier populaire de Scampia au nord de la ville de Naples (photo à gauche,) et quartier de Gomorra, le livre. Des tueurs tirent sur Salvatore Cipolletta dans la tempe et dans le dos. La victime, âgée de 36 ans, avait des antécédents pénaux pour usure, extorsion, vol à main armée et trafic de drogue (cf. De la Camorra et des cols blancs). Il appartenait au clan Amato-Pagano que l’on nomme aussi les « Espagnols » parce qu’ils se sont réfugiés, un temps, en Espagne (on les voit dans Gomorra, le film). La victime était donc alliée au groupe des « Sécessionnistes » qui s’est séparé de la tutelle de clan Di Lauro. Après les arrestations du boss Paolo di Lauro et de ses fils en 2005, les «Espagnols» se sont placés du côté des vainqueurs.
Avec ce meurtre, le clan Di lauro tente de reprendre aux « Sécessionnistes » une place dans le domaine de la vente de drogue. En effet, le meurtre a eu lieu dans la rue Labriola, lotissement G, un endroit isolé entre deux grands immeubles de type HLM. Cette zone est régulièrement transformée en « fortins » par la Camorra à l’aide de murs d’enceinte, de portails renforcés et de caméras de surveillance.
C’est le 24ème meurtre de Camorra depuis le début l’année (cf. Les clans de la Camorra en recomposition)
La classe politique italienne ne parle plus de mafia
Le 18 mars 2008, la Garde des finances et la Direction des enquêtes antimafias de Naples ont arrêté une trentaine de personnes. La police financière italienne a mis sous séquestre des biens appartenant au clan des Casalesi (cf. art. 18).
La police des finances a saisi des biens mobiliers et immobiliers, des terrains et des entreprises, des comptes bancaires pour une valeur de plusieurs millions d’euros. Ces biens étaient, en général, attribué à des prête-noms qui exerçaient tant en Campanie que dans la région du Latium. En 2006, la Commission parlementaire antimafia avait déjà signalé les infiltrations mafieuses dans la région de Rome (Cpa 2001-2006).
Les clans utilisent leur avocat contre Roberto Saviano
Le journaliste a déchaîné les foudres des clans, en particulier celles des Casalesi. Les Casalesi sont un cartel de clans qui opérent dans l’arrière pays napoiltain. Menacé de mort, l’écrivain est au secret quelque part en Italie.
Au mois de septembre 2007, faisant fi de cette menace, il avait participé à un meeting contre la mafia à Casal di Prinicpe, la ville des Casalesi. Dans la foule se trouvait le père de Francesco Schiavone : (voir photo). Ce dernier, surnomé « Sandokan » est le chef mafieux de Casal di Principe. La présence d’un membre de la famille d’un « boss » emprisonné constitue une menace mafieuse typique. C’est ainsi que communique la mafia. Saviano a, donc, repris le chemin de la « clandestinité ».
Le 15 avril, les Italiens votent à nouveau.
Leçon de légalité par un collégien et un handicapé mental
Le 10 août 2007, un tueur, envoyé par le clan Di Lauro, a assassiné Nunzio Cangiano, 46 ans, appartenant au clan des « sécessionnistes » de Secondigliano dans la périphérie nord de Naples. Du point de vue de la logique mafieuse, Nunzio Cangiano, aurait eu le tort de passer du côté du clan Amato-Pagano, « les sécessionnistes », qui semblent sortir vainqueur de leur affrontement avec les Di Lauro. Ces derniers ont donc tué Nunzio Cangiano pour sa trahison. On appelle cela la « violence programmée » (Umberto Santino-Csd). Le tueur, Mario Buono, 22 ans, s’est présenté devant un parc d’attraction et a froidement tiré sur le camorriste qui attendait dans la file, avec sa femme et ses enfants.
De la Camorra et des cols blancs
Le 6 mars 2008, les carabiniers du Ros, spécialisés dans l’action contre le crime organisé, ont arrêté trois camorristes de haut rang de la ville de Nola. Parmi eux figurent, Domenico Russo, Giovanni Pandico et Salvatore Russo, le fils du boss déjà emprisonné.
Les carabiniers ont aussi procédé à la saisie de biens pour une valeur estimée à 300 millions d’euros. Certains des biens sont des supermarchés de la marque Deco, des agences immobilières, des terrains, des appartements et des voitures de luxe. Les enquêtes ont mis à jour des comptes bancaires en Italie et en Suisse. Les enquêteurs ont découvert des violations des normes contre le blanchiment de la part des banques de connivence.
En effet, sans la complicité des « cols blancs », la mafia n’existerait pas.
Ps : le calibre 9mmX21 IMI (98 FS) est un calibre « civil » spécifiquement utilisé dans des armes de poing italiennes (Beretta). Cette munition a été développée car les tireurs sportifs italiens n’ont pas accès aux munitions « de guerre » comme le 9mmX19 (9 mm parabellum) qui équipe l’OTAN (ce n’est pas le cas en France ou tout membre de la FFTir remplissant les conditions nécessaires peut acquérir des armes militaires, dans la mesure où elles ne peuvent tirer en rafale) . Les capacités techniques de cette munition sont identiques à celles du 9 mm parabellum, mais ne peuvent être chambrées dans une arme militaire. Tout cela est dû à la « curiosité » de la législation sur les armes en Italie. C’est pour cette raison que l’on ne trouve le 9X21 imi qu’en Italie. Il n’est donc pas surprenant de retrouver cette munitions dans les mains de mafieux (elle a sans doute été dérobée), Rodier (Alain), cf2r.