Articles avec le tag ‘41 bis’
Bienvenu au royaume de l’impunité
L’article 41 bis du code de procédure pénal italien prévoit un régime carcéral strict pour les chefs mafieux. Cela permet d’isoler le mafieux de son milieu criminel, de ses complices et de lui enlever le pouvoir de commander sur son territoire. L’article 41 bis n’est pas un régime d’un emprisonnement inhumain. Les chefs mafieux ont le droit de voir leur femme et leurs enfants[1], sans parler de leurs avocats…
Cette limitation des visites permet, peu ou prou, aux enquêteurs de restreindre le pouvoir de nuisance du mafieux emprisonné. A ce jour, 566 chefs mafieux sont soumis aux règles de l’article 41 bis. Cela ne représente que 6,5% des mafieux emprisonnés…
Le mafieux veux bien aller en prison! Cela fait partie de son travail et lui donne du prestige. En revanche, il déteste perdre le contrôle sur sa famille mafieuse. Depuis l’introduction de ces normes, les familles mafieuses ne cessent de solliciter les politiciens pour qu’ils les éliminent. En 1993, les mafieux avaient commis des attentats pour mettre fin au 41 bis. Il semble qu’ils aient gagné leur bras de fer avec l’Etat.
En effet, depuis six mois, les tribunaux d’application des peines ont révoqué le régime d’emprisonnement strict à trente sept parrains. Parmi eux se trouvent quatre capibastone, des puissants chefs de ‘ndrines, les familles mafieuses calabraises, de la ‘Ndrangheta considérée comme la mafia plus dangereuse en Italie (art. La ‘Ndrangheta comme Al Quaida? ). Il y a également des « boss » palermitains qui ont décidé la mort des juges Falcone et Borsellino en 1992. Le dernier en date, se nomme Antonio Madonia. Il est le chef de la cosca, la famille mafieuse palermitaine de Resuttana (en photo). Jeune, Antonio Madonia a participé à l’assassinat du préfet Carlo Alberto Dalla Chiesa.
A chaque fois, les magistrats justifient leur décision de révocation par « il n’a pas été démontré que le détenu avait la capacité de maintenir encore des contacts avec l’association criminelle d’appartenance ». Une réforme s’impose. Celle-ci serait basée sur la dangerosité du personnage et non plus sur sa capacité a garder le contact avec son clan. On ne voit pas comment la majorité au pouvoir ferait cette réforme. En trois mois, elle vient de proposer :
– l’interdiction faite à la presse de publier les écoutes téléphoniques à disposition de la justice;
– l’immunité totale pour le président de la République, pour le président du Conseil constitutionel, pour les deux présidents du Parlement et pour le président du Conseil.
– la suspension de tous les procès en appel pour des délits punis par moins de 10 ans d’emprisonnement.
[1] Le Conseil constitutionnel n’a cessé de rogner sur les applications du 41 bis.
Antimafia de droite
La députée Angela Napoli, du parti « Alliance Nationale », un mouvement néofasciste, soutient toutes les initiatives visant à éradiquer la criminalité en Italie. Angela Napoli est membre de la commission parlementaire antimafia. Récemment, elle a interpellé le ministre de la justice sur les révocations de l’article 41 bis. L’article 41 bis du code procédure pénale prévoit un régime carcéral strict pour les chefs mafieux. Cet isolement de la société permet de limiter l’influence des chefs sur leur famille. D’après la députée Napoli, de nombreux mafieux ont bénéficié de la révocation de cette mesure et sont désormais en mesure de communiquer avec leurs soldats.
Elle prend l’exemple du boss de Cosenza Franco Penna et de son bras droit Gianfranco Ruà. Dans le cadre du procès « missing », le capobastone est accusé de 12 homicides mafieux. Surtout, il a déjà été condamné à la prison à vie ! Pourtant, le tribunal de l’application des peines a révoqué les mesures d’isolement strict à l’encontre de ces deux chefs de ‘ndrine (la famille mafieuse en Calabre). Ces révocations s’ajoutent aux libérations des chefs mafieux quand les délais de leur détention provisoire sont dépassés (art.14). Ces décisions ridiculisent l’Etat italien. La conséquence réside dans le fait que les citoyens ne peuvent collaborer avec l’ Etat jugé faible contre des mafias qui ont beaucoup de pouvoir. La députée demande un contrôle de l’application des meures rendues par les tribunaux d’application des peines.
En Italie, il existe bien une tradition antimafia de droite. Le juge Falcone était de gauche et son meilleur allié était le magistrat Paolo Borsellino dont les sensibilités politiques étaient identiques à celles de la député d’Alliance Nationale (droite radicale). Cependant, les hommes politiques de droite « antimafias » sont généralement étouffés par les affairistes, par les « transformistes » (ceux qui changent de camps) et par les complices directs de la mafia. Ces trois catégories de politiciens forment une majorité au sein de la droite italienne. La députée Napoli est l’exception qui vient confirmer la règle.