Archive pour la catégorie ‘Vidéos’
L’Antimafia à l’honneur sur France 3
Pino Maniaci, journaliste sicilien courageux et iconoclaste de Telejato a fait l’objet d’un reportage (Marc Dana) dans le l9-20 de France 3 en collaboration avec l’administrateur du site mafias.fr : jeudi 25 juin 2009. Vous pouvez visonner le reportage en vous rendant sur le site des archives de France télévison : et taper dans « rechercher » : « Maniaci ».
Pour d’autres informations en français : article de cafebabel.
Gomorra au gouvernement ?
Au mois septembre 2008, le » repenti » a affirmé que les députés Mario Landolfi (Alliance nationale) et le sous-secrétaire du gouvernement Berlusconi, Nicola Cosentino, étaient des référents du clan des Casalesi.
L’homme politique de Forza Italia, Nicola Cosentino, avait des intérêts dans la société Eco 4 qui récoltait les déchets dans la province de Casal di Principe (région de Naples) et dont le gérant a été assassiné pour avoir parlé à des magistrats ( N°73. Le premier « cadavre exquis » des « ecomafias » ).
Gaetano Vassallo : « Je déclare que j’ai agi pour le compte de la famille mafieuse Bidognetti qui gérait la société Eco4 à travers les frères Orsi. Ces derniers payaient un pot-de-vin de 50 000 euros par mois [au clan nda]. Je peux dire que la société Eco 4 était gérée par les députés Nicola Cosentino et Mario Landolfi… je me suis présenté personnellement pour donner les 50 000 euros comptant à Sergio Orsi et à Cosentino. La rencontre a eu lieu dans la maison du député [originaire de la région nda]. Cosentino a reçu la somme dans une enveloppe jaune et Sergio Orsi m’a informé sur son contenu ».
On comprend pourquoi le nouveau gouvernement n’est pas pressé de mettre en place la Commission parlementaire antimafia.
Voici une vidéo tirée de Biutiful Cauntri
La « zoomafia » filmée en Sicile
Cette semaine, une chaîne de télévision française a diffusé un court reportage sur une course clandestine de chevaux dans la province de Messine (vidéo d’une autre chaîne).
A la fin de la diffusion, le commentateur évoque une infraction « moins grave (« inofensives » cit.) que le trafic de drogue… ». En réalité, les courses clandestines relèvent du contrôle du territoire et du consensus social. C’est parce que les mafias contrôlent le territoire qu’elles sont les plus fortes en matière de grands trafics. Pour illustrer ce propos, vous pouvez relire un article paru au mois de mars (cf. « Zoomafia » au quotidien). Les courses de chevaux font partie des activités dénommées « zoomafia ». Ces activités criminelles sont incluses dans le concept des « ecomafias » (cliquez pour plus de précisions).
L’Italie, ses déchets, son béton et ses mafias
Au printemps dernier, Naples croulant sous les déchets, le monde ne voyait plus l’Italie comme le pays des musées. Une élection et une compétition de football après, un constat s’impose, l’Italie est le pays des «écomafias».
L’écomafia. Le mot apparaît en 1999 pour désigner les activités criminelles qui portent atteinte à l’environnement. On parle aussi de la criminalité environnementale. Pour l’année 2007, Legambiente, une association pour la protection de l’environnement, estime que les écomafias ont rapporté 18 milliards d’euros, dont plus de 50% aux quatre mafias italiennes. Les écomafias renforcent le pouvoir de la mafia sur son territoire et elles dynamisent leurs liens avec les institutions et avec les acteurs économiques.
«Archeomafia». Le mot désigne les trafics d’œuvres d’art par la mafia qui prélève souvent son butin à la source, sur les sites archéologiques.
«Zoomafia». Les mafieux organisent des courses clandestines de chevaux, des combats de chiens, et gèrent les paris clandestins ainsi que la commercialisation des produits dopants. Quoi de plus ? La zoomafia met facilement en évidence le contrôle mafieux du territoire. Les courses des chevaux se déroulent sur les routes départementales ou sur les plus importantes artères des villes, expressément fermées au trafic. Ainsi, en 2004, une course a même eu lieu sur le périphérique de Palerme !
Le «cycle du ciment». Ce circuit criminel regroupe les constructions sans permis, l’excavation illicite de matériaux de construction, comme le sable ou la terre, et l’infiltration des appels d’offres. En Italie, on commence d’abord par faire construire sa maison sans permis, ensuite on vote pour le centre droit qui promulgue une loi de régularisation. L’annonce de la régularisation incite alors les citoyens à construire sans permis. Et la droite reste au pouvoir…
Le «cycle des déchets» ou l’icône de la criminalité environnementale. Le système économique italien produit chaque année environ 108 millions de tonnes de déchets. Il s’agit de 28 millions de tonnes de déchets domestiques et de 80 millions de tonnes de scories industrielles. Pour la plupart, ces déchets ne sont pas traités. Une seule politique : la mise en décharge. Parfois ils sont emballés en attendant que l’on trouve le moyen de les traiter comme sur la photo.
Les entrepreneurs du Nord ont organisé le traitement illégal de leurs déchets :
– toxiques: ils sont déclassés à un niveau de dangerosité inférieur et sont déposés dans des décharges légales, ou bien ils sont employés comme fertilisants; ils peuvent aussi être abandonnés dans des hangars de propriété inconnue.
– classiques: ils sont déposés dans des décharges illégales. L’Italie en est parsemée. Celles-ci sont en général des carrières dont les entreprises «marrons» se servent pour s’approvisionner en sable, en terre ou en pierre, dans le cadre de cycle du ciment. Les déchets remplacent alors les matériaux de construction. En remplissant ces trous béants avec des déchets, les criminels dissimulent les excavations illégales.
– Enfin, les déchets peuvent être brûlés comme c’est le cas, notamment, en Campanie. La culture de l’illégalité étant généralisée en Italie, les dirigeants d’entreprises publiques se débarrassent aussi de leurs déchets avec l’aide de la mafia. Les écomafias sont un parfait exemple de convergence entre les mafias, les milieux économiques et des secteurs de l’administration.
Un cas d’école. La région de Naples est la plus peuplée d’Italie. Le tri sélectif s’élève à moins de 5 %. Les décharges publiques sont saturées. Les compagnies de ramassage des ordures sont souvent aux mains des clans de la Camorra bénéficiant d’un réseau de complicités. Les entreprises de la Camorra vont chercher les déchets du Nord et les déversent dans des décharges légales et illégales. Un repenti de la Camorra napolitaine déclarait devant la commission parlementaire antimafia : «Les ordures valent plus que l’or.»
Dans l’arrière-pays napolitain, seul le clan contrôlant sa zone a le droit de déverser des déchets. Celui qui le ferait sans l’autorisation de la famille mafieuse serait puni de mort. Ainsi à Ponticelli, le clan Sarno sous-traitait les écomafias à la communauté rom. Le clan faisait payer le pizzo, l’impôt mafieux, aux Roms pour les autoriser à habiter des baraques de fortune. Les mafieux permettaient aux Roms de faire le tour des petites entreprises pour récupérer les matériaux polluants età les en débarrasser contre une dizaine d’euros.
Le clan des Casalesi a recouvert la province de Caserta de décharges illicites. Désormais, de grandes quantités de déchets, surtout liquides et inflammables, sont brûlées pendant la nuit, libérant de la dioxine dans l’atmosphère. Nombre d’animaux des fermes environnantes ont été empoisonnés par les retombées chimiques. Les instances sanitaires ont fait abattre les animaux et ont retiré du marché les produits afférents à leur exploitation.
Biutiful cauntri. C’est un documentaire choc qui sort aujourd’hui dans les salles françaises (1). On y voit l’arrière-pays napolitain saturé de décharges. Il illustre le problème national de sécurité et de santé publique posé par les écomafias. En effet, le taux de cancer dans l’arrière-pays de Naples est le plus élevé d’Italie.
Les caméras d’Esmeralda Calabria, la réalisatrice, filment les camions venus du Nord pour décharger des scories industrielles
sur des terrains fertiles. A l’aide d’écoutes téléphoniques, on peut entendre le cynisme d’une criminalité en col blanc qui fait alliance avec les mafieux sur l’autel de la rentabilité. Dans une scène-clef du film, un militant pour l’environnement demande à visiter une décharge publique. Le vigile lui refuse l’entrée au motif qu’il s’agit d’une propriété privée !
Et pourtant, on garde espoir. Raffaele del Giudice, le Don Quichotte du film, démontre que la société napolitaine dispose
d’anticorps pour sortir de cette situation, mais la volonté politique manque…
La mafia taxe l’eau et l’electricité des plus défavorisés
Le 3 juillet 2008, la magistrature de Palerme a mis en examen une vingtaine de personnes accusées d‘être les collecteurs du pizzo, l’impôt mafieux. Les 20 personnes « travaillant » pour la cosca, la famille mafieuse sicilienne, sévissaient dans le quartier de San Lorenzo. Cette opération de police fait suite à de nombreuses autres visant à démanteler la cosca de Salvatore Lo Piccolo (art. 7).
Tout est parti de l’arrestation et de la collaboration de Francesco Franzese[1], un des bras droit de Lo Piccolo dont on peut voir la photo en haut à gauche (Corriere della sera). Depuis tous les cadres du groupe Lo Piccolo sont passés du côté de la justice. Les entrepreneurs de la zone ont même décidé de collaborer avec l’Etat.
Dans ce quartier Palerme, tous payent le tribut à la mafia. Dans la cité populaire du Zen, les habitants des HLM sont contraints de payer un impôt de 15 à 20 euros pour avoir droit à
l’alimentation en eau et en électricité. Si un habitant refuse de payer, les soldats de la mafia coupent l’alimentation.
Les mafieux profitent du « sous-développement organisé » qui règne dans le Sud de l’Italie (art. 80)). Ils peuvent ainsi s’octroyer des « faveurs ». Par exemple, un
des lieutenants de Salvatore Lo Piccolo a été arrêté chez une résidente du Zen. Avec un peu de chance, ce mafieux lui faisait grâce des 15 euros de pizzo …
Déjà dans les années soixante-dix, les femmes de ce quartier étaient utilisées comme courriers de la drogue vers les Etats-Unis. Ces jeunes femmes des campagnes débarquées à Palerme après un exode rural, étaient violées par les mafieux à l’aller et au retour.
Conclusion :
– La mafia est une organisation secrète : pas de lutte antimafia sans « repentis » ;
– L’idée d’une mafia « protectrice des opprimés » est un mythe.
[1] Francesco Franzese a vraisemblablement des origines normandes. Son nom et la couleur de ses cheveux constituent des indices révélateurs. A noter que la Sicile a longtemps été gouvernée par les Normands.
Arrestation de Giuseppe Nirta
Le vieux boss est un acteur de premier plan de la faida de San Luca qui voit s’opposer les ‘ndrines Nirta-Strangio contre celle des Pelle Votari. Les enquêteurs pensent qu’en 2007, le capo-bastone a assassiné en personne Bruno Pizzata, 59 ans. Il s’agissait de la première réaction à l’assassinat de Maria Strangio en 2006. Maria Strangio était la belle-fille du boss.
Giuseppe Nirta est donc le père de Giovanni Luca Nirta, celui qui a probablement ordonné la tuerie de Duisburg au mois d’août 2007 (art.6). L’arrestation du chef de la ‘ndrine Nirta, une des familles mafieuses qui a le plus de prestige au sein de la ‘Ndrangheta, est un succès des forces de l’ordre qui ont utilisé des filatures discrètes et des écoutes téléphoniques. En effet, les policiers ne peuvent pas compter sur la colaboration de « repentis ». A San Luca, la loi silence est strictement respectée.
Récemment, le procureur national antimafia avait invité les femmes de San Luca à livrer les hommes du clan encore en fuite. La réponse des femmes de San Luca ne s’est pas fait attendre. On peut voir les photos en cliquant ici.
Pour être précis :
– La première photo représente la société civile qui lutte contre la mafia. Au centre le procureur Piero Grasso tente de faire passer son message de collaboration avec l’Etat.
– Le deuxième photo représente des femmes qui soutiennent des pancartes indiquant « nous sommes les Nirta-Strangio, nos hommes ont été arrêtés sans preuve. »
– La troisième photo représente un enfant dont la pancarte indique » Des assassins ont emporté maman, l’Etat m’a pris mon père« .
– La mafia calabraise est le première mafia d’Italie. La richesse économique n’est pas sa seule force.
‘Ndrangheta : mafia « numéro un »
L’Eurispes, l’institut des études politiques, économiques et sociales, a publié son rapport 2008 sur la ‘Ndrangheta, la mafia calabraise. Ce dernier confirme les études des commissions parlementaires antimafias et le rapport des services de renseignement (art .13). La mafia calabraise est devenue l’organisation criminelle la plus puissante, la plus riche et donc la plus dangereuse pour l’Etat italien. D’après l’Eurispes, le chiffre d’affaire de la mafia calabraise a été de 44 milliards d’euros pour l’année 2007. Cela représenterait 2,9% du produit intérieur brut (estimé à 1.535 milliards d’euros). Le chiffre d’affaire de la « holding ‘Ndrangheta » est équivalent à ceux de l’Estonie (13,2 milliards d’euros) et de la Slovénie (30,4 milliards d’euros) réunies.
Le secteur le plus rémunérateur demeure le trafic de drogue qui rapporterait 27,24 millions d’euros soit 62% de la totalité des profits.
Les blanchisseurs de la mafia
Le 8 mai 2008, les juges antimafia de Palerme ont mené une opération contre le blanchiment d’argent provenant des familles mafieuses. Les magistrats ont fait arrêter Francesco et Ignazio Zummo, père et fils. En 2006, ces entrepreneurs ont déjà été condamnés pour le délit d’association mafieuse. Ayant accepté un procédure abrégée, ils ont donc reconnu leur action pro-mafia devant la justice. Celle-ci a aussi mis en examen un banquier suisse accusé d’attribuer des biens à des prête-noms. Depuis 2003, il était l’intermédiaire entre les chefs d’entreprises Zummo et un banquier de Nassau. Les entrepreneurs téléphonaient depuis des cabines publiques de Palerme au banquier Suisse qui donnait ensuite les ordres à une banque implantée aux Bahamas. La justice a saisi le compte en banque, dénommé Pluto, créditeur de 13 millions d’euros, et elle a pu mener des perquisitions dans des agences
bancaires à Milan et à Lugano.
La lutte contre le blanchiment est indispensable à la lutte antimafia voir l’affaire dnas ce reportage sur la confiscation
Le porte-monnaie, talon d'Achille de la mafia di euronews-fr
« Pauvre » Saviano
L’auteur du livre « Gomorra », Roberto Saviano est condamné à mort par le clan des Casalesi (art. 18 ). Les Casalesi sont un cartel de clans qui règnent en maître à Casal di Principe, dans l’arrière pays de Naples (art. 53). Pour sa sécurité, le journaliste, philosophe de formation, vit sous protection policière permanente dans des lieux tenus secrets.
Avril 2008, pendant un mois, il a tenté de louer un appartement dans le quartier de Vomero à Naples. D’après le quotidien il Mattino, un groupe de locataires voisins a refusé la présence du journaliste menacé de mort par la mafia.
En Italie, une importante partie de la population est « gênée » par les personnes qui luttent contre la mafia. Déjà, dans les années quatre vingt, les voisins du juge Falcone se plaignaient du va-et-vient des voitures de police de son escorte. A Naples, on préfère être racketté et crouler sous les ordures plutôt que de vivre avec un homme courageux à ses côtés. En effet, la peur est omniprésente. Ce type d’acte au quotidien constitue une victoire pour la mafia.
C dans l’air avril 2008, 1 minutes 36 secondes sur Saviano :